L’établissement

Historique

Saint-Spire présente les traits les plus typés de la collégiale castrale fondée et soutenue par une dynastie de petits comtes d’Ile-de-France autour de reliques (ici celles de saint Exupère et de saint Loup, évêques de Bayeux) déplacées et captées. C’est la seule tradition qui indique le seigneur (ou comte) Aimon comme fondateur, en 963. Car l’établissement, venu enrichir un réseau ecclésial comptant aussi Saint-Guénault (devenue en 1134 prieuré victorin) et Notre-Dame (collégiale attestée dès 1093), n’est guère documenté pendant un siècle.

Le plus ancien acte du chartrier (connu par un vidimus royal de 1393 et par une copie au cartulaire du XIIIe siècle) remonte en effet à 1071 : c’est un privilège par lequel le comte de Corbeil Bouchard reconnaît les libertés de l’établissement, auquel est confirmé le droit d’exercer la justice du cloître et des chanoines, à l’exception des causes criminelles réservées à l’évêque de Paris ; l’acte est validé du sceau du roi Philippe Ier. Il établit que la collégiale était également dédiée aux Douze apôtres (édition Coüard n° I, mais nouvelle édition critique par Maurice Prou, Recueil des actes de Philippe Ier, n° LX).

L’histoire de l’établissement est en ceci plus originale que le roi capétien, héritant précocément des seigneurs-comtes de Corbeil, devint le nouveau maître du château et de la collégiale, et apparaît dans cette double posture grâce à une documentation étoffée dès un acte de 1119 (daté 1118 dans l’édition, n° II, republié par Jean Dufour, Recueil des actes de Louis VI, n° 156). Cette documentation, où les actes de don n’apparaissent qu’à partir de 1183, s’enrichit en effet, aux années 1150-1250 environ, de textes réglementaires, de dispositions diverses sur les prébendes, mis par écrit sous la double pression de l’évêque, détenteur du droit de visite, et du roi, qui tient solidement son pouvoir de nomination de l’abbé (parfois son propre fils), comme la possibilité de donner ou faire donner des prébendes (l’une de celles-ci fut octroyée à Saint-Victor, une autre à Saint-Denis). Les périodes où Corbeil entrent dans le douaire d’une reine (comme pour Adèle, épouse de Philippe Auguste) ne voient bien sûr aucun changement de fond au statut et à la dépendance de la collégiale.

Localisation du patrimoine à grands traits

On peut avoir une idée assez précise de l’implantation foncière de l’établissement à la fin du XIIe siècle grâce à une bulle de Célestin III de 1196 par laquelle le pape prend sous sa protection l’église de Saint-Spire et son temporel. Outre l’emplacement de l’église et son cloître avec hôtes et maisons, celui-ci consistait en une série éclatée de biens et droits à Corbeil et immédiats environs (terres, moulins, vignes, prés) ainsi que les deux foires de la Saint-Spire et de la Saint-Gilles. Au-delà, mais la plupart du temps à grande proximité, le pape confirmait la villa de Ballancourt [-sur-Essonne, cant. Mennecy], des hôtes à Fontenay [-le-Vicomte, Essonne, cant. Mennecy], Chevannes [Essonne, cant. Mennecy] et Soisy [-sur-Seine, Essonne, cant. Saint-Germain-lès-Corbeil, plutôt que Soisy-sur-École, Essonne, cant. Milly-la-Forêt], la villa de Villededon [comm. et cant. Saint-Pierre-du-Perray], diverses possessions à Évry, à Villarcel, Ermenonville [-la-Grande ou -la-Petite, Eure-et-Loire, cant. Illiers-Combray] et Arpajon [Essonne, ch.-l. cant.].

Réseaux de bienfaiteurs

La concentration du patrimoine semble montrer que les jeux étaient largement faits quand les Capétiens devinrent maîtres de Corbeil. Les actes, de fait, ne font guère saisir que des donations plutôt intermittentes et éclatées.