L’établissement

Historique

La première phase de l’histoire de Saint-Merry, longue et riche du VIIIe au milieu du XIIe siècle, doit s’écrire en pointillé, sans l’aide du chartrier, qui montre une collégiale déjà prospère au milieu d’un dense tissu urbain et social.

C’est vers 700 que l’abbé de Saint-Martin d’Autun Merry (Medericus) fut enseveli à proximité d’une chapelle dédiée à l’apôtre saint Pierre, sise en bordure de la voie romaine, et où il s’était retiré les trois dernières années de sa vie en compagnie de son disciple Frou (Frodulphus). Un culte local rendit bientôt honneur à Merry, objet d’une translation en 884. Saint-Pierre-et-Saint-Merry était déjà à cette époque une abbatiola, dont on peut supposer que le temporel avait été scindé en deux menses, la part de l’abbé (sans doute abbé laïc) faisant l’objet de nombreuses mainfermes confirmées en 937 par le roi Louis IV. Le document est aussi l’occasion de découvrir une assise foncière dispersée à proximité mais aussi dans les environs de Paris, sur les deux rives de la Seine (Linas et Vivarias, Ivry, Monsivry près de Villejuif, L’Haÿ, Saviès à Belleville, Drancy, Morgevalle, Nigeon sur l’actuel quai de Tokyo à Paris, Montmartre, Vetus Mansus, Thermes [de Cluny], et peut-être actuel cul-de-sac du Bœuf près de l’église même).

La deuxième période s’ouvre avec ce qui a les apparences d’une reprise en main ecclésiastique lancée au début du XIe siècle, quand l’évêque de Paris Renaud donne à son chapitre cathédral l’autel de l’église (« quoddam altare in honore Sancti Petri et Sancti Mederici dedicatum in suburbio Parisiensi » : éd. Lasteyrie, Cartulaire général de Paris, n° 74, p. 101-102). Même si l’on ignore tout des circonstances exactes de la fondation d’une collégiale de chanoines séculiers à Saint-Merry, celle-ci eut toutes les allures d’une sorte de filiale du chapitre cathédral, dont elle fut d’ailleurs censée l’une des quatre « filles », avec Saint-Étienne-des-Grés, Saint-Benoît et Saint-Sépulchre. Au XIIIe siècle, elle comptait sept chanoines, dont le plus éminent, dit chefcier (capicerius), était en charge de la cure.

La collégiale se trouvait aussi, en effet, à la tête d’une paroisse, aux limites tourmentées. L’église, rebâtie fin XIIe ou début XIIIe siècle, peut-être avec l’aide de cet Odo Falconarius célébré dans une inscription comme « fondateur » (l’édifice actuel est du XVIe siècle), vit autour d’elle germer un bourg de peuplement, bientôt pris dans un tissu densifié, et englobé dans la ville intra muros de l’enceinte de Philippe Auguste.

Localisation du patrimoine

Saint-Merry était à la tête d’une censive sur la rive droite, morcelée entre plusieurs enclaves, mais dont « la partie la plus importante se trouvait au nord de la rue de la Verrerie, à l’est de la rue Saint-Martin, au sud du rempart [de Philippe Auguste] et sur les deux côtés de la rue du Temple ». Cette censive emportait haute justice, mais la justice de sang fut abandonnée au roi Philippe III à l’exception de la justice du cloître qui restait entière.

De fait, rares sont les actes intéressant des biens non parisiens, comme à Montreuil ou L’Haÿ, qui semblent pour partie remonter à la dotation haut-médiévale de l’établissement.

Réseaux de bienfaiteurs

Les actes, tardifs, renseignent moins sur le réseau des donations (œuvre de chevaliers urbains ou de bourgeois) que sur celui des multiples relations nouées par l’établissement. Plusieurs actes de l’évêque et du chapitre cathédral de Paris voisinent ainsi avec une multitude d’accords et de conventions passés avec d’autres établissements ecclésiastiques : Saint-Antoine (n° 2, 20, 22, 33, 34, 39), Saint-Marcel (n° 6), Saint-Thomas du Louvre (n° 8), Hôtel-Dieu de Paris (n° 11), Hôpital de la Trinité (n° 15, 45), Saint-Jacques (n° 16, 21), Saint-Magloire (n° 18, 24), Montmartre (n° 23), Saint-Lazare (n° 25, 26), Livry (n° 27, 36-38), léproserie de Juvisy (n° 48), Saint-Germain-l’Auxerrois (n° 53), pour ne citer que les plus proches.