DELARÜE Pierre, *Théophile

Nom: 
DELARÜE
Prénom: 
Pierre, *Théophile
Date de début d'activité: 
03/07/1829
Adresses professionnelles: 

16, rue Notre-Dame-des-Victoires (1828)

Ville - Département: 
Paris
Prédécesseurs: 
Informations personnelles: 

Il est né le 3 décembre 1799 à Amiens (Somme)  ; son père était négociant. Il a travaillé pendant  neuf ans  "dans l'une des premières maisons de la capitale", et, depuis trois ans, il est l'associé du lithographe Bernard, son beau-père. Leurs lithographies sont signées de leurs deux noms jusqu'à l'obtention du brevet de Delarue.

Informations professionnelles: 

Il est spécialisé dans "l'impression de toutes écritures relatives au commerce et aux administrations". Parmi ses premiers clients, on trouve, en effet, le préfet de Seine-et-Oise, qui lui confie l'impression des listes électorales de 1828, et les Messageries du commerce qui ont besoin d'imprimer circulaires et instructions ; l'administration de la Librairie leur a refusé d'avoir une presse dans leurs locaux  pour ne pas léser les intérêts des lithographes, mais elle autorise un lithographe breveté à installer une de ses presses chez elles. C'est donc Delarue qui obtient le 31 mai 1830 cette autorisation. Il  travaille aussi pour l'Office-Correspondance pour les journaux français et étrangers, mais, dans ce cas, il fait ces travaux d'autographie chez lui jusqu'à ce que Le pelletier, le directeur de l'Office demande, en 1834, son propre brevet. Parallèlement, il poursuit la collaboration entamée avec Henry Monnier. Du temps de son association avec son beau-père, ils avaient imprimé une série de 24 illustrations des chansons de Béranger, venant après l'ensemble de satires de moeurs du Paris vivant. Il imprime donc les Distractions (1832) de Monnier, mais aussi, profitant du libéralisme des débuts de la monarchie de Juillet, des estampes plus politiques avec les Pasquinades (1831), dont 7 planches sur 12 sont dues à Monnier. Comme beaucoup de ses confrères, il imprime aussi des portraits d'artistes et de musiciens donnés en prime avec le journal Le Voleur. Autre spécialité : les cartes et plans ( L'entrepôt à TivoliPlan de la Ville, du Port et des Environs d'Oporto, Ville de Lyon...) avec d'originales cartes du trajet des nouveaux chemins de fer ou bateaux à vapeur. En 1828,  avait commencé la publication de l'Isographie des hommes célèbres, ou Collection de fac-similés de lettres autographes et de signatures qui compte près de 650 autographes. Une seconde édition augmentée sera publiée en 1843.  Devenu ainsi spécialiste de la reproduction des écritures, il est consulté, à partir de 1838, dans plusieurs affaires testamentaires testament Bertheau, 1838 ;  testament Psalmon, 1866 ; testament Lespinasse, 1867...) pour lesquelles il il réalise une analyse graphologique ; il peut donc  se dire expert assermenté près la Cour impériale en 1869.
À la fin des années 1830, sa production évolue vers des applications de la lithographie plus originales ou plus techniques car il est avant tout un inventeur. D'ailleurs, annonçant en février 1845  l'ouverture de son nouvel atelier où il a 12 presses, il se présente comme lithographe, artiste, éditeur et expert.
Dès 1834, il a demandé l'autorisation d'avoir une presse typographique car il pense avoir trouvé un moyen d'imprimer en même temps textes et dessins obtenus par la taille-douce, la lithographie et l'autographie ; il joint  un superbe exemple à sa demande, apostillée par des membres de la Société d'encouragement, Lasteyrie, Mérimée, le baron Thénard et plusieurs artistes...  Si cette invention ne se répand pas, en revanche, à la demande de la Banque de France, il invente un nouveau procédé, dérivé de celui de Mantoux, pour empêcher la fabrication de faux billets par la lithographie, puis par la photographie. À partir de 1842, il se dit donc "Imprimeur de la Banque de France" ou fait figurer sur ses productions "Lith de la Banque" car il traite le papier des billets dans sa propre imprimerie avant de le livrer à la Banque de France. Il est pour cela rémunéré par la Banque en fonction du volume traité tandis que les banques départementales lui octroient une rente viagère de 300 F. En 1848, ces dernières ont fusionné et la création de coupures plus petites de 100 F a considérablement augmenté le volume des billets à imprimer. La banque de France décide donc d'internaliser tout le processus de fabrication des billets et rémunère désormais Delarue comme expert aux appointement annuels de 2 500 F, portés à 4 000 F en 1858. Il fait partie de la Commission spéciale des billets, créée en 1849, et fait paraître Du papier de sûreté et subsidiairement du papier monnaie pour répondre  aux interrogatoins de la Banque, mais aussi des administrations et des particuliers préoccupés par les faux. Il fait aussi profiter de ses compétences diverses autres banques et participe à l'impression de billets de 10 drachmes infalsifiables pour le compte de la Banque de Grèce, ce qui l'oblige à demander l'autorisation de transporter une de ses presses à Belleville où sont imprimés les billets. L'autorisation accordée en 1847 doit être renouvelée en 1849 car divers événements ont retardé son travail ; il va pouvoir enfin appliquer le procédé qu'il a inventé : une couche graisseuse étendue avant impression des billets sur le papier qui après une dessication de six semaines à l'air libre, rend le décalquage impossible. D'autres banques étrangères (Banque de Gênes, Banque nationale de Bruxelles, Banque des États pontificaux...) demanderont à profiter de l'invention mais à travers l'expertise de la Banque de France.  En 1854, Delarue peut se dire "expert en faux" (Almanach du commerce), àl a fois pour son expertise graphologique et son travail auprès de la Banque de France. 
Ses productions et ses recherches lui ont valu des récompenses : mention Honorable en 1827,  puis médaille de bronze en 1834  aux expositions industrielles ; médaille d'argent en 1833  de la Société d'encouragement. Il ne semble pas qu'elles l'aient enrichi : on le dit proche de l'indigence en 1847, d'où l'importance de sa rémunération par la Banque puisqu'il ne peut breveter son invention qui doit rester secrète.
Il vend aussi des fournitures pour la lithographie (crayons, encres et papiers autographiques), s'engageant à expédier des pierres lithographiques de Châteauroux et Münich,  et des articles à décor lithographié (abat-jours, écrans à main et à cheminée).
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Bibliographie Sources: 

Archives Nationales F18 1753
Almanach du commerce, 1839
Almanach du commerce, 1837, p. 164

 Delarue (Théophile), Du Papier de sûreté et subsidiairement du papier monnaie... , 1849.
Rapport officieux sur les actes testamentaires contestés du colonel Lespinasse par M. Thle Delarue expert, 1869.
 

INPI, 1 BA 3895  Appareil destiné à remplacer les fumivores, en imprimant un mouvement de rotation aux abats-jours, 1832. 
           1 BB 6718  Encrier soupape à niveau constant, 1847.      http://bases-brevets19e.inpi.fr

Sur l'Isographie des hommes célèbres, voir Twyman (Michael), Early lithographed books, London, Farrand Press, 1990.

Bidaux (Mathieu), "La sécurité des billets de la Banque de France à l'épreuve de la lithographie, Bulletin de la Société française de numismatique, 75/7, 2020, p.226-233.
      "               "          La fabrication des billets en France; Construire la confiance monétaire (1800-1914), Paris, Presses de Sciences Po, 2021, p. 219-227.

 

Remarques: 
E. P., 27/11/2018. Revu 30/12/2022.