Nom: BREUGNOT Prénom: Claude, Joseph Date de début d'activité: 09/09/1834 Date de fin d'activité: 17/09/1841 Adresses professionnelles: 8, rue de Louvois Ville - Département: Paris Adresse personnelle: 58, grande rue de Chaillot (1834) |
Il est né le 16 avril 1782 à Châtillon-sur-Seine (Côte-d'or). Son père était orfèvre. Selon le rapport de police, il a été employé au cadastre en Belgique, mais s'il est bien ingénieur géographe et auteur de cartes, il est peut-être, pour la Belgique, confondu avec un homonyme. Il est membre de la Société de géographie depuis 1831. Il s'associe avec Jean Joseph François Prévost qui a loué en 1832 un local au 16, passage Colbert pour y exploiter le nouveau Géorama, une attraction dans la veine du Géorama de Delanglard, ouvert en 1826, du Cosmorama de la galerie Vivienne voisine et autres panoramas de toiles peintes. Ce n'est pas un succès et, après avoir cédé leur décor à un nommé Serville, les deux associés vont chercher à rentabiliser d'autre manière leur expérience.
Ayant été confronté au problème de la reproduction de cartes géographiques de grande taille, Breugnot reste fidèle au procédé mis en oeuvre dans l'impression lithographique, mais cherche à substituer la feuille de zinc à la pierre utilisée comme support. L'idée n'est pas nouvelle, mais les résultats ont été jusqu'ici décevants. Or il a mis au point une solution acide adaptée au traitement du zinc et il en dépose le brevet le 29 mars 1834. À l'Exposition des produits de l'industrie française de 1834, il reçoit une médaille de bronze pour ses "impressions sur planches de zinc" et il ne manquera pas de faire valoir que le Roi s'est montré "vivement intéressé" par leur présentation. Parallèlement, il a passé un accord, en 1833, avec Charles Pitois, gendre de Caroline Levrault, pour se rendre à Strasbourg dans l'imprimerie Levrault et y utiliser la zincographie. À son retour, il a pu présenter au ministre de l'Instruction publique plusieurs cartes de géographie.
Prévost, de son côté, a déposé une demande de brevet de lithographe, expliquant que "les curieux ne venant pas [au Georama], les deux associés se borneront à fabriquer pour les institutions et les amateurs au moyen de leur procédé métallographique. C'est dans le local où était placé l'exposition qui'ls ont installé leur atelier de dessin et d'impression". Le brevet lui est refusé le 25 avril 1834 : fonctionnaire de la Préfecture de police, son éloignement avait été demandé et il s'était retrouvé commissaire à Nantes avant d'être destitué ; on le dit "criblé de dettes dont plusieurs ont le caractère d'escroqueries" et l'argent de l'établissement vient de Breugnot... Prévost, qui dit avoir déjà acheté 2 presses et payé un bail de 2 300 F, demande aussitôt des explications...
L'affaire devient plus embrouillée. Breugnot semble avoir rompu son association avec Prévost et cède son brevet à Paul Carcenac qui le dépose le 23 mai 1834, après l'avoir complété et modifié en fonction d'essais récents ; ce dernier obtient aussi du Préfet de police, le 14 juin, l'autorisation d'utiliser une presse dans le local occupé par Breugnot pour continuer des essais de zincographie pendant que l'administration de la Librairie instruit sa demande de brevet. Protestation de cette dernière qui n'a reçu aucune demande de Carcenac et juge l'autorisation donnée par le Préfet anormale car préjugeant de sa décision concernant un éventuel brevet.
Le 23 juin, Breugnot se décide à faire lui-même sa demande d'un brevet de lithographe qui lui permettrait d'éviter le recours à un imprimeur breveté et, par conséquent, une dépense inutile. Le commissaire inspecteur de la Librairie Bailleul consacre à ce procédé qui "mériterait le nom exact de zincographie ou métallographie" et que Breugnot lui-même a perfectionné, un long rapport détaillé et très favorable à l'attribution du brevet. Il justifie la demande de l'inventeur : "Il doit faire usage simultanément de presses lithographiques et de presses en taille-douce. Le premières, ayant une pression plus forte, serviront pour faire les décalques, mais le tirage proprement dit aura lieu sur les secondes dont le foulage plus doux ménagera davantage les planches de zinc qui à ce moyen supportent sans altération un tirage de plusieurs milliers. L'emploi d'une presse lithographique est donc tout à fait secondaire", la dernière remarque devant lever les réticences de la police toujours inquiète d'une nouvelle utilisation des techniques de reproduction. Il conclut en énumérant les avantages de la substitution du zinc à la pierre : économie, portativité, facilité d'exécution pour les dessins de grande dimension, plus grande solidité des planches, bénéfice pour la France des sommes exportées chaque année pour l'achat de pierres lithographiques de Bavière". Bailleul ose même soutenir que les liens de Breugnot avec Prévost, s'ils existent encore, ne pourraient constituer un motif de refus du brevet. Devant l'opposition renouvelée du Préfet de police, Bailleul écrit le 12 août, un second rapport, toujours favorable à Breugnot, même s'il reconnaît que l'avantage de ne plus importer de pierres lithographiques allemandes grâce à la zincographie, se trouve "amoindri par la découverte en France de carrières de pierre à dessin". En revanche, il balaie les accusations portées anonymement (Breugnot aurait des "principes politiques favorables à Henri V"), n'ayant pas eu le temps de"remonter à la source de ces bruits injurieux et de les contrôler d'une manière positive". Il emporte la décision. Breugnot, signant le récépissé de son brevet, fera suivre sa signature de la fière mention " zincographe du Roi"...bien que ce type de privilège n'existe plus dans l'Imprimerie.
En 1834, "les propriétaires de ce procédé [disaient n'avoir] en vue l'impression que de quatre genres particuliers : les cartes géographiques sur papier et sur calicot ; les grandes affiches pour les voitures publiques ; la musique ; les dessins de bronzes, pendules et plaques." Il ne semble pas que l'Imprimerie zincographique Breugnot ait prospéré dans ces domaines. Le brevet de Breugnot, passé à Carcenac, sera vendu par les héritiers de celui-ci, en septembre 1838, à Eugène Kaeppelin, grand imprimeur de cartes géographiques, et l'impression des partitions musicales fera plus tard un usage abondant de la zincographie. Breugnot lui-même a continué à "dresser et dessiner sur zinc " quelques cartes ( Europe : divisions naturelles et politiques..., France. Dénomination raisonnée des départements ; voies principales..., 1839), mais il n'est plus fait mention de son imprimerie, à moins que ce ne soit de celle de Guérin, avec qui il va être en procès, l'accusant de lui avoir volé ses planches du Georama.
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Archives Nationales F18 1740
INPI, 1 BA 4577, Moyen de remplacer la pierre lithographique par le zinc, 1834. http://bases-brevets19e.inpi.fr
Le Lithographe, 1839, p. 29.