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                     Testament olographe de Louis Jean Ravignon, mort pour la France à Massiges (Marne), le 25 septembre 1915.
Papier à lettre blanc, 4 pages, dim. 21 x 16,2 cm, encre.
Cote aux Archives nationales : MC/ET/LXXXIX/2342, minute du 8 décembre 1915
Le 18 septembre 1915
(Espace de 2 lignes environ laissé blanc)Ceci est mon testament
(Espace d’une ligne laissé blanc)L’attaque des lignes allemandes est imminente ; le jour
 exact n’en est pas
                     encore fixé, mais il n’est pas loin : l’artillerie,
 qui commence
                     aujourd’hui ses tirs de réglage, doit ouvrir
 la brèche dans laquelle nous
                     nous précipiterons pour
 rompre enfin la ligne ennemie. Sur les pentes de
                     la cote
 191 et plus loin sur celles de 185 - dit la chenille - pas
                     mal des nôtres resteront : je puis en être.
C’est pourquoi il m’a paru convenable de prendre
 auparavant quelques
                     petites dispositions - elles seront
 courtes - et de dire adieu à ma mère,
                     mon père et à
 tous ceux de ma famille que j’aime et chéris.
 Ce que je
                     possède – et qui n’est pas grand’chose - objets
 laissés 60 rue des
                     Tournelles, ma cantine et un panier
 qui sont avec moi aux armées, les
                     quelques sous déposés
 à la Société générale et dont le compte est
                     détaillé
 par la lettre ci-jointe du 26 Avril 1915 de la Société
 générale s’élevant à 3600 f. d’obligations de la Défense
 nationale, plus un solde de 226 f. 19, je le laisse à mon
 père et à ma mère pour tout emploi qu’ils
                     jugeront
 utile. 
Je demande simplement que l’on fasse parvenir à
Melle Andrée Le Bihan demeurant 55, rue
 Meslay à Paris, le paquet qui
                     est à son adresse dans 
                     Deuxième page 
                     ma cantine ; cette jeune fille, qui est mon amie,
                     m’aimait, et je
 ne crois pas qu’il soit possible de montrer un
                     attachement
 aussi grand et sans la moindre arrière-pensée ; elle
                     mérite
 tous les égards et l’affection de tous. Personne ne la
                     préviendra s’il m’arrive le dernier accident ; c’est pourquoi
 j’en charge
                     mes parents. 
M’étant ainsi, si je puis dire, conformé aux usages du monde
 en réglant
                     les derniers petits détails de la vie lorsque la
 mort paraît proche,
                     j’envoie un ultime adieu à mes
 parents en les priant de n’avoir pas trop
                     de chagrin en
 apprenant que j’ai été tué, puisque ç’aura été, comme
                     on est coutumier de le dire, pour la patrie. Je
 quitterai le monde sans
                     trop de regrets car sa monotonie
 est trop grande et les moments agréables
                     y sont trop rares.
 J’ai terminé. 
Fait le dix-huit septembre mil neuf cent quinze, étant
 sain de
                     corps et d’esprit.
                        
                           (Espace d’une ligne laissé blanc)
                        
                        Vale
                     
Jean Ravignon
Troisième page(Mentions hors teneur postérieures au testament, non éditées) Quatrième page
(Page blanche, non numérisée)