Charles, par la grace de Dieu roy de France, à tous presens et à venir, salut.
Chacun sçait assez que les feuz roys de tres louable memoire noz pere et ayeul
(que Dieu absolve), se monstrans tres chrestiens et protecteurs de la saincte
Eglise, se sont esvertuez par edictz et voyes de justice en conserver l'unyon
et reprimer la division de religion de leur temps entrée en ce royaume par
presches faictz enaet E assemblées
cachées et distribution de livres reprouvez, et que, aprés l'infortuné trespas
de nostred. seigneur et pere, aucuns des grandz, poulsez par les ministres de
la nouvelle opinion, se malcontenterent et diviserent, sans zelle toutesfoys
d'aucune religion, mais par ambition de gouverner ced. royaume, soubz feu
nostre tres cher et tres amé seigneur et frere aisné le roy Françoys second,
combien qu'il feust maryé et majeur par les loix dud. royaume, ayant auctorité,
sens et vouloir de bien commander et ordonner, avec le tres saige conseil de
nostre tres honnorée dame et mere la royne et autres grandz et vertueux
personnaiges ayans tousjours esté pres dud. feu roy nostre pere, continuez par
nostred. feu frere, pour l'intention qu'il avoit d'ensuivre en toutes choses
les vestiges paternelz, ce qu'il a clairement monstré par œuvres durant le
temps qu'il a regné ; et eust mis sond. royaume en repos tel qu'il l'avoit
trouvé à son advenement à la couronne s'il eust pleu à Dieu luy donner plus
longue vye, parce que son Estatbestre B avoit esté alteré et troublé par la division d'aucuns des
grandz. Lesquelz ne s'osans manifester susciterent par l'ayde desd. ministres
le tumulte d'Amboyse1, soubz umbre de presenter une requeste avec une confession
de foy aud. roy. Lequel, ores qu'il sceust la source et les autheurs du mal,
par tres grande bonté à luy naturelle à l'exemple du Pere celeste, esperant
moyennant sa grace tirer plus de fruict par la voye de misericorde que de
rigueur de supplices, par edict faict à Amboise au moys de mars M VC cinquante
neuf2, donna abolition generalle à tous ses subjectz seduictz
et devoyez de la foy qui se vouldroient reduyre ; et d'abondant, par autre
edict faict à Romorantin au moys de may suyvant3,
delaissa ceulx qui ne se reduiroient à la justice ecclesiastique (qui n'est
sanglante) pourveu qu'ilz ne troublassent la tranquilité publicque. Ce
nonobstant, led. roy fut frustré de son esperance par les menées secrettes
desd. grandz obstinez, s'essayans par armes troubler ced. royaume, encores
soubz pretexte de religion, et en ayant eu seur advertissement, estant à
Fontainebleau, fut contrainct s'en aller à Orleans avecques des forces pour y
donner bon ordre ; et à celle fin avoit faict assemblée des estatz
generaulx4. Auquel lieu le Createur l'appella à soy, nous faisant roy en
l'aage de dix à unze ans, moins suffisant de gouverner ced. grand royaume. Et
le meilleur secours que Dieu nous eust laissé de la prudente conduicte de
nostred. tres honnorée dame et mere en noz affaires fut fort empesché et
retardé par le mespris de nostre bas aage que aucuns premiers aprés noz tres
chers et tres amez freres eurent, et des partialitez et contradictions qu'ilz
feirent avec leurs adherens à nostred. tres honnorée dame et mere. Et pour eulx
fortiffier, prindrent la protection de lad. nouvelle opinion, laquelle
s'augmenta grandement par leur support et faveur.
Pour à quoy remedier, au retour de noz sacre et couronnement5, nous veinsmes aux faulxbourgs
Sainct-Germain des Prez pres Paris et feismes assembler en nostre Parlement les
princes et gens de nostre Conseil privé avec toutes les chambres d'icelluy
Parlement en ju[i]n et juillet M VC LXI, et par leur
advys feismes à Sainct-Germain en Laye l'edict dud. moys de juillet oud.
an6, par lequel nous defendismes tout
autre exercice de religion que selon l'usaige receu et observé en l'Eglise
catholique, dès et depuis la foy chretienne receue par les roys de France noz
predecesseurs et par les evesques et prelatz, curez, leurs vicaires et deputez.
Et voyans lesd. protecteurs de lad. nouvelle opinion que leur ambitieuse
entreprise par cest edict estoit aneantye, ne voulurent souffrir qu'il eust
lieu, ains feirent eslever par tous les endroitz dud. royaume ceulx de lad.
nouvelle opinion, empeschans qu'il ne feust executé. Et à cause des troubles
que eulx mesmes faisoient commancer en divers lieux, meirent en avant
l'impossibilité de l'execution dud. edict, et de faire autre assemblée de
certain nombre de presidens et conseillers de toutes les courtz souveraines de
ced. royaume pour estre plus auctorisée, combien qu'elle feust moindre des deux
tiers que celle faicte en nostred. parlement de Paris des deux compaignies
ordinaires7. Et
la leur fut de gens qu'ilz choisirent, estans les plus fortz en nostre Conseil
privé. Et en meirent plus grand nombre de lad. nouvelle opinion que de
catholiques pour parvenir à leur fin, comme ilz feirent de la tollerance de
l'exercice de deux religions par nostre edict provisionnal faict le XVII
janvier oud. an M VC LXI8. Lequel nostred. tres honnorée dame et mere,
pour lors n'estant la plus forte, contre son opinion, laquelle a tousjours esté
tres chrestienne, fut contraincte laisser passer, comme aussi furent nostre
tres cher et tres amé cousin le cardinal de Bourbon, et semblablement noz tres
chers et bien amez cousins les cardinal de Tournon, duc de Montmorency,
connesapp, et mareschal de Sainct-André, qui estoient des principaulx et plus
anciens conseillers et officiers de nostre couronne que les feuz roys nosd.
seigneurs pere et frere nous avoient laissé ; qui, entre autres occasions qui
les meurent à tollerer ce que dessus, remonstrerent à nostred. tres honnorée
dame et mere que c'estoit le moins mal que l'on pouvoit faire alors, veu que
l'exercice de lad. nouvelle opinion demeuroit entierement hors des villes et
qu'il falloit esperer que nous reparerions ce mal quant nous serions parvenuz
en plus grand aage, auctorité et puissance, qui nous rendroient noz subjectz
plus obeïssans. Ce que attendant nostred. tres honnorée dame et mere, en
singuliere devotion, s'arresta à continuer en tres grande vigillance nostre
institution et celle de noz tres chers et tres amez freres et de nostre tres
chere et tres amée sœur9 en la vraye
religion de l'Eglise catholique, apostolique et romaine, que les roys tres
chrestiens noz predecesseurs ont tenue et defendue depuis unze cens ans ou prescpres, et par elle prosperé E,
dont nous et noz subjectz luy sommes grandement tenuz et obligez.
Et combien que, par led. edict de janvier, ceulx de lad. nouvelle opinion
eussent de quoy estre plus que contans s'ilz n'eussent esté poulsez d'autre
ambition et desseing que de la satisfaction de leurs cons[c]iences, comme le
tesmoignoient assez leurs deportemens, allans ordinairement à leurs presches et
assemblées avec port d'armes, toutesfoys ne se contentans de lad. licence, tost
aprés nostred. edict feirent tres ample et manifeste declaration de leur
mauvaise volunté, s'armans de leur licence privée contre nous, surprenans noz
villes, mectans les estrangiers en nostred. royaume et faisans tous actes
d'hostilité jusques à nous donner une bataille pres la ville de Dreux10 en laquelle Dieu nous
donna la victoire, ayant compassion de son peuple à nous soubzmis.
Pour encores vaincre de clemence noz subjectz rebelles et les reduire en
nostre obeïssance, esperans que par temps la bonté divine, par le moyen de
nostre majorité, les reduiroit en celle de son Eglise durant le repos publicq,
nous leur accordasmes, estans encores en bas aage, l'edict de pacification
faict à Amboise le XIX mars LXII, par lequel leur permeismes l'exercice de leur
religion tel qu'il est contenu par icelluy11. Et
encores que depuis, pour leur oster toute la craincte, deffiance et souspeçon
qu'ilz eussent peu avoir, nous eussions par leur advis mesmes faict plusieurs
declarations, reiglemens et ordonnances tendantes au repos publicq et à la
reunyon de tous noz subjectz, ce neantmoins ilz y ont journellement et
licentieusement contrevenu de leur part, encores que de la nostre led. edict,
qui n'estoit que provisionnal et revocquable par nous, ayt esté entretenu pour
eviter les troubles et les calamitez qui les suivent, sans leur donner une
seulle occasion de reprendre les armes, ce qu'ilz feirent toutesfoys à la
Sainct-Michel derniere12, et nous veindrent trouver
accompaignez de nostred. tres honnorée dame et mere, nosd. tres chers et tres
amez freres et sœur entre Meaulx et Paris, se couvrans depuis qu'ilz nous
vouloient presenter une requeste pour la manutention de leur religion. Et
neantmoins sans intermission ilz nous continuerent la guerre ouverte, jusques à
nous assieger en nostre ville capitale dud. Paris, brusler les moulins pour
nous affamer, surprendre plusieurs de noz villes, mectre de rechef estrangiers
en nostred. royaume et nous contraindre à donner une bataille aux portes de
Paris13 pour lever le
siege qu'ilz y avoient mys, usans de toutes voyes et actes d'hostilité.
Ce nonobstant, voulans espargner le sang de nostre noblesse et autres noz
subjectz, esperans les gaigner par doulceur et bonté et ayans pitié du pauvre
peuple mangé des deux armées, recherchez par eulx de pacification, par noz
lettres patentes données à Paris le vingt troisiesme mars dernier14 nous leur accordasmes le mesme edict du XIX mars M
VC LXII, sur la promesse qu'ilz nous feirent de
l'entretenir de leur part et ne troubler plus nostred. royaume. A laquelle,
sans que ayons failly à l'entretien dud. edict, eulx contrevenans, qui ne nous
ont voulu rendre noz ville[s] de La Rochelle, Montauban, Castres et plusieurs
aultres, tant en Languedoc que Daulphiné, comme ilz nous avoient promis, faict
faire en aucuns endroictz de nostred. royaume assemblées en armes qui ont
meurdry plusieurs noz subjectz catholiques et faict practicques d'estrangiers,
soubz coulleur qu'ilz disent aucuns de leur religion avoir esté tuez par des
catholiques depuis l'edict de pacificationddepuis lad. seconde pacification E, dont nous avons sur leur
plaincte baillé commission d'informer et faire justice des delictz, ont cinq
moys aprés reprins les armes contre nous, se sont retirez en Lad. Rochelle et
pays circonvoisins, y faisans guerre ouverte. A quoy nous15, veoyans qu'ilz abusent
tant de foys de nostre bonté et doulceur et ne pouvans plus doubter de leur
damnée entreprise d'establir et constituer en ced. royaume une autre
principaulté souveraine pour deffaire la nostre ordonnée de Dieu, et diviser
par telz artifices noz bons subjectz de nous, mesmes par le moyen de la
permission dudit exercice de leur religion et des assemblées qu'ilz font soubz
coulleur de leurs presches et cenes, esquelles ilz font collectes de deniers,
enroollementz d'hommes, sermens, associations, conjurations, practicques et
menées, tant dedans que hors nostred. royaume, par armes le troublent, et les
ayans en main traictent avecques nous comme voisins, non comme subjectz
obeïssans qu'ilz se declarent de bouche et par escriptz et font actes d'ennemys
mortelz telz qu'il ne nous est possible les contanter ny retenir, mais en
veulent tousjours davantage pour abbattre noz religion et Estat s'ilz peuvent,
affin de demourer seulz par le moyen dud. exercice permis durant nostre bas
aage, et depuis continué pour le bien de paix et le pis eviter contre nostre
volunté, qui avons tousjours enferméeeu ferme E en nostre cueur la vraye religion comme roys tres chrestiens
doibvent, et sommes resoluz y vivre et mourir, recongnoissans la grace que Dieu
nous a faicte par son immense bonté d'avoir conservé nosd. religion et Estat
depuis nostre advenement à la couronne contre si grandes machinations, et nous
avoir de cest heure donné aage, entendement et jugement suffisans pour nous
gouverner, et ce qu'il nous a mis entre mains et pour ayde nostre tres cher et
tres amé frere le duc d'Anjou, aussi homme comme nous, nostre lieutenant
general16 tres affectionné à noz personne et service, uny de
religion à nous, comme est semblablement nostre tres cher et tres amé frere le
duc d'Alençon, pour ces causes et autres considerationsfautres grandes considerations E à ce nous mouvans,
aprés avoir eu sur ce l'advis de nostre tres honnorée dame et mere, de nosd.
tres chers et tres amez freres, aultres princes de nostre sang et autres grandz
princes, seigneurs et gens de nostre Conseil privé,
aet E. bestre B. cpres, et par elle prosperé E. ddepuis lad. seconde pacification E. eeu ferme E. fautres grandes considerations E.
1 Une conjuration protestante visant à s’emparer
de François II et des Guise avait été éventée au début de mars 1560. La
plupart des conspirateurs furent arrêtés entre le 10 et le 15 mars et
exécutés.
2 Edit donné à Amboise en mars 1560, enregistré au Parlement le
11 mars 1560.
3 Édit donné à
Romorantin en mai 1560, enregistré au Parlement le 16 juillet 1560.
4 Etats généraux d’Orléans, 13 décembre 1560-31 janvier
1561.
8 Edit donné à
Saint-Germain-en-Laye le 17 janvier 1562, enregistré au Parlement le 6 mars
1562 (cf. édit n° I).
9 Marguerite de Valois, future reine de
Navarre. Les deux autres sœurs du roi, Élisabeth reine d’Espagne et Claude
duchesse de Lorraine, ne se trouvaient plus en France.
11 Edit donné à Amboise le 19 mars
1563, enregistré au Parlement le 27 mars 1563 (cf. édit n° II).
12 Le 26 septembre 1567, Catherine de Médicis,
avertie du projet des réformés d’enlever le roi et sa famille, se réfugia à
Meaux et de là regagna Paris le 28, veille de la Saint-Michel. Les chefs
huguenots prirent alors les armes.
14 Edit donné à Paris le 23 mars 1568, enregistré au Parlement le 27 mars 1568
(cf. édit n° III).
15 Début de
la troisième guerre civile, 23 août 1568.
16 Le duc d’Anjou avait été nommé lieutenant général du
royaume par lettres patentes du 12 novembre 1567 enregistrées au Parlement
le 17 novembre suivant (Arch. nat., X1A 8627, fol.
61 r°-64 v°).
V, 08
Pourront aussi ceulx de lad. Religion faire l’exercice d’icelle es lieux qui
ensuivent, assavoir : pour le gouvernement de l’Isle de France, aux faulxbourgs
de Clermont en Beauvoisiz et en ceulx de Crespy en Laonnoys ; pour le
gouvernement de Champaigne et Brye, oultre Vezelay qu’ilz tiennent aujourd’huy,
aux faulxbourgs de Villenoce ; pour le gouvernement de Bourgongne, aux
faulxbourgs d’Arnay le Duc et en ceulx de Mailly la Ville ; pour le
gouvernement de Picardye, aux faulxbourgs de Montdidier et en ceulx de
Riblemont (sic); pour le gouvernement de Normandye, aux faulxbourgs de Ponteau
de Mer et en ceulx de Carrenten ; pour le gouvernement de Lyonnoys, aux
faulxbourgs de Charlieu et en ceulx de Sainct-Geny de Laval ; pour le
gouvernement de Bretaigne, aux faulxbourgs de Becherel et en ceulx de Kerhez ;
pour le gouvernement de Daulphiné, aux faulxbourgs de Crest et en ceulx de
ChorgueeChorges E; pour le
gouvernement de Provence, aux faulxbourgs de Merindol et en ceulx de
Forcalquier ; pour le gouvernement de Languedoc, oultre Aubenas qu’ilz tiennent
aujourd’huy, aux faulxbourgs de Montaignac ; pour le gouvernement de Guyenne à
Bergerac, oultre Sainct-Sever qu’ilz tiennent aussi aujourd’huy ; et pour
celluy d’Orleans, Touraine, le Mayne et pays Chartrain, oultre Sancerre qu’ilz
tiennent, au bourg de Maillé.
Seront tenuz aussy garder et observer les festes indictes en l'Eglise
catholique, appostolique et romaine, et ne pourront ez jours d'icelles
besongner, vendre, ne estaller à boutiques ouvertes,
ny pareillement les artisans travailler hors leurs
boutiques, et en chambres et maisons fermées, esd. jours de festes et
autres jours deffenduz, en aucun mestier dont le bruit puisse estre
entendu au dehors des passans ou des voysins, dont la recherche
neantmoings ne pourra estre faicte que par les officiers de la
justice.
Ordonnons que, incontinant aprés la publication de cestuy nostre eedict, toutes
trouppes et armées, tant par mer que par terre, se separent et retirent, et
seront tenuz ceulx de lad. Religion, et autres qui ont suivy leur party, vuider
toutes garnisons des villes, places, chasteaulx et maisons qu'ilz tiennent,
appartenans tant à nous que aux ecclesiasticques et autres particuliers, et les
delaisser, rendre et remectre en plaine liberté, ainsi qu'elles estoient en
plaine paix auparavant les presens et precedans troubles. Et neantmoins, parce
que plusieurs particuliers ont receu et souffert durant lesd. troubles tant
d'injures et dommaiges en leurs biens et personnes que difficilement ilz
pourront en perdre sitost la memoire, comme il seroit bien requis pour
l'execution de nostre intention, voulans eviter tous inconveniens qui en
pourroient advenir, en actendant que les rencunes et inimitiez soient
adoulcies, nous avons baillé en garde à ceulx de lad. Religion pretendue
reformée pour le temps et terme de six ans les villes qui s'ensuivent,
assçavoir en Languedoc celles de Montpellier et Aiguemortes ; en Daulphiné
Nyons et Serre, ville et chasteau ; en Provence Seyne la Grand Tour et le
circuit d'icelle ; en Guyenne Perigueulx, La Reolle et Le Mas de Verdun.
Lesquelles villes nosd. frere et cousin le roy de Navarre et prince de Condé et
vingt gentilzhommes de lad. Religion, ou autres qui ont suivy leur party, qui
seront par nous nommez, et en oultre ceulx qui seront commis à la garde desd.
villes et chasteaulx d'icelles, jureront et promectront, ung seul et pour le
tout, pour eulx et ceulx de lad. Religion et autres de leur party, de les nous
bien et fidellement garder ; et au bout du terme susd. de six ans à compter du
jour et dacte du present eedict, les remectre es mains de ceulx qu'il nous
plaira deputer, en tel estat qu'elles sont, sans y rien innover ny alterer, et
sans aucun retardement ou difficulté pour cause et occasion quellexBOmis qu'elle soit ; au bout
duquel terme l'exercice de lad. Religion y sera continué comme lors qu'ilz les
auront tenues. Neantmoins, voulons et nous plaist qu'en icelles villes tous
ecclesiasticques puissent librement rentrer, faire le service divin en toute
liberté et jouyr de leurs biens, pareillement tous les habitans catholicques
d'icelles villes, lesquelz ecclesiasticques et autres habitans nosd. frere et
cousin et autres seigneurs, ensemble les gouverneurs et cappitaines desd.
villes, et gens de guerre qui y seront mis en garnison, prendront en leur
protection et sauvegarde, à ce qu'ilz ne soient empeschez à faire led. service
divin, molestez et travaillez en leurs personnes et en la jouissance de leurs
biens, mais au contraire remis et reintegrez en la plaine possession d'iceulx.
Voulant oultre que esd. villes noz juges y soient restabliz, et l'exercice de
la justice remis comme il souloit estre auparavant les troubles.
Le semblable sera observé en l’eslection des officiers catholiques qui doivent
servir es chambres qui seront establies es pays de Guyenne, Languedoc, Dauphiné
et Provence.
Ainsi signez à l’original : HENRY DE BOURBON, LOUIS DE BOURBON, BIRON,
DESCARS, S. SULPICE, DE LA MOTHE-FENELON, LA NOUE, L. DUFAUR chancelier du roy
de Navarre, S. GENIS, CHAUVIN, DUFAUR, CLAUSONNE deputé du Languedoc, MORIN
deputé de Guyenne, SCORBIAC deputé de Montauban, PAYAN deputé de Languedoc, et
suivant son pouvoir, THORÉ pour l’Isle de France, DE SIGNO deputé de Dauphiné,
DURAND deputé de Guyenne, GUYET pour La Rochelle, S. BOIGNON pour La Rochelle,
COURTOIS deputé de Vendomois, ROUX deputé de Provence, G. DEVAUX pour la
Rouergue. Ainsi signé : Collationné, DE NEUFVILLE.
Registrées avec les articles secrets cy attachez, ouÿ et ce requerant le
procureur general du roy. A Bourdeaux en Parlement, le cinquieme jour de
decembre 1581. Signé : DE PONTAC.
XI, 11
Le roy envoyra au païs et duché de Guyenne une chambre de justice composée de
deux presidens, quatorze conseilliers, ung procureur et advocat du roy, gens de
bien, amateurs de paix, d'integrité et suffisance requise, lesquelz seront par
Sa Majesté choisiz et tirez des parlemens de ce royaume et du Grand Conseil, et
en sera la liste communicquée au roy de Navarre, affin que, si aucun[s]
d'iceulx estoient suspectz, il soit loisible le faire entendre à Sad. Majesté,
laquelle en eslira d'autres en leurs places. Lesquelz presidens et conseilliers
ainsi ordonnez congnoistront et jugeront toutes causes, procés, differendz et
contraventions à l'edict de paciffication dont la congnoissance et jurisdiction
a esté par led. edict atribuée à la chambre composée par iceluy, serviront deux
ans entiers aud. païs et changeront de lieu et sceance par les seneschaulcées
d'iceluy de six mois en six mois, affin de purger les provinces et rendre
justice à ung chacun sur les lieux. Et neantmoins a esté accordé que, par
l'establissement de lad. chambre, ceulx de lad. Religion pretendue reformée
dud. païs ne seront privez du privileige et benefice qui leur est concedé par
led. eedict par l'establissement de la chambre tripartie ordonnée par iceluy,
de laquelle les presidens et conseilliers de lad. Religion demoureront uniz et
incorporez en la court de parlement de Bourdeaux suivant leur erection, pour y
servir et avoir rang et sceance du jour qu'ilz y ont esté receuz, et joÿront
des honneurs, auctoritez, preeminences, droictz, emolumens et prerogatives
quelzconques ainsi que les autres presidens et conseilliers de lad. court. Et
pour le regard des provinces de Languedoc et Daulphiné, les chambres qui leur
ont esté ordonnées par led. eedict y seront establiescrestablies E et continuées selon et ainsi qu'il est
porté par iceluy et les articles de lad. conference de Nerac. Et sera la
sceance prochaine de celle de Languedoc en la ville de [blanc], et pour celle
de Daulphiné sera establie suivant ce qui a esté cy devant ordonné.
Les recusations qui seront proposées contre les presidens et conseilliers desd.
chambres de Guyenne, Languedoc et Daulphiné pourront estre jugées au nombre de
six, auquel nombre les parties seront tenues de se restraindre, autrement sera
passé oultre sans avoir egard ausd. recusations.
Les officiers subalternes des provinces de Guyenne, Languedoc et Daulphiné dont
la reception appartient aux courtz de parlementz, s'ilz sont de lad. Religion,
pourront estre examinez et receuz en la chambre de l'eedict sans que autres se
puissent opposer et rendre parties à leurs receptions que les procureurs du roy
et les pourveuz desd. offices. Et neantmoins le serment acoustumé sera par eulx
presté esd. courtz de parlementz, lesquelz ne pourront prendre aucune
congnoissance de lad. reception, et au reffuz desd. parlemens lesd. officiers
presteront led. serment ausd. chambres.
Les procés des vagabons seront jugez par les juges presidiaulx, prevostz des
mareschaulx et viseneschaulx, suivant le vingt cinqiesme article dud. eedict et
huictiesme de lad. conference. Et pour le regard des domiciliers es provinces
de Guyenne, Languedoc et Daulphiné, les substitutz des procureurs generaulx du
roy esd. chambres feront, à la requeste desd. domiciliez, apporter en icelles
les charges et informations faictes contre iceulx pour congnoistre et juger si
les cas sont prevosapps ou non, pour aprés selon la qualité des crimes estre
par icelles chambres renvoiez pour estre jugez à l'ordinaire ou prevosappment,
ainsi qu'ilz verront estre à faire par raison, en observant le contenu esd.
articles dud. eedict et conference. Et seront tenuz lesd. juges presidiaulx,
prevostz des mareschaulx et visseneschaulx de respecter, obeÿr et satisfaire
aux commandementz qui leur seront faictz par lesd. chambres tout ainsi qu'ilz
ont acoustumé de faire ausd. parlemens, à peine de privation de leurs estatz.
Oultre la chambre cy devant establie à Castres pour le ressort de nostre court
de parlement de Tholouse, laquelle sera continuée en l'estat qu'elle est, nous
avons, pour les mesmes considerations, ordonné et ordonnons qu'en chacune de
noz courtz de parlement de Grenoble et Bourdeaux sera pareillement establie une
chambre composée de deux presidentz, l'un catholique et l'autre de lad.
Religion pretendue reformée, et douze conseillers, dont les six seront
catholiques et les autres six de lad. Religion ; lesquelz president et
conseillers catholiques seront par nous prins et choisis des corps de nosd.
courtz. Et quant à ceulx de lad. Religion, sera faicte creation nouvelle d'un
president et six conseillers pour le parlement de Bordeaulx, et d'un president
et trois conseillers pour celuy de Grenoble, lesquelz avec les trois
conseillers de lad. Religion qui sont à present aud. parlement seront employez
en lad. chambre de Daulphiné. Et seront creez lesd. offices de nouvelle
creation aux mesmes gages, honneurs, aucthoritez et preeminencessprerogatives A2 que
les autres desd. courtz. Et sera lad. sceance de lad. chambre de Bourdeaulx
aud. Bourdeaulx ou à Nerac, et celle de Daulphiné à Grenoble.
Lad. chambre de Daulphiné congnoistra des causes de ceulx de lad. Religion
pretendue reformée du ressort de nostre parlement de Provence, sans qu'ilz
ayent besoing de prandre lettres d'evocation ny autres provisions qu'en nostre
chancellerie de Daulphiné ; comme aussy ceulx de lad. Religion de Normandie et
Bretagne ne seront tenuz prandre lettres d'evocation ny autres provisions qu'en
nostre chancellerie de Paris.
Noz subjectz de lad. Religion du parlement de Bourgogne auront le choix et
option de plaider en la chambre ordonnée au parlement de Paris ou en celle de
Daulphiné. Et ne seront aussy tenuz prandre lettres d'evocation, ny autres
provisions qu'esd. chancelleries de Paris ou Daulphiné, selon l'option qu'ilz
feront.
Quand il sera question de faire procés criminel par les prevostz des marechaux
ou leurs lieutenans à quelqu'un de lad. Religion domicilié, qui sera chargé et
accusé d'ung crime prevostal, lesd. prevostz ou leurs lieutenans, s'ilz sont
catholiques, seront tenuz d'appeller à l'instruction dud. procés un adjoinct de
lad. Religion, lequel adjoinct assistera aussy au jugement de la competance et
au jugement definitif dud. procés, laquelle competance ne pourra estre jugée
qu'au plus prochain siege presidial, en assemblée avec les principaulx
officiers dud. siege qui seront trouvez sur les lieux, à peine de nullité,
sinon que les prevenuz requissent que la competance fust jugée esd. chambres
ordonnées par le present eedit. Auquel cas pour le regard des domiciliez ez
provinces de Guïenne, Languedoc, Provence et Daulphiné, les substitudz de noz
procureurs generaulx esd. chambres feront à la requeste d'iceulx domiciliez
apporter en icelles les charges et informations faictes contre iceulx pour
congnoistre et juger si les causes sont prevosapps ou non, pour aprés selon la
qualité des crimes estre par icelles chambres renvoyées à l'ordinaire ou jugées
prevosappment ainsy qu'ilz verront estre à faire par raison, en observant le
contenu en nostre present eedit ; et seront tenuz les juges presidiaulx,
prevostz des marechaux, visbaillys, vissenechaux, et autres qui jugent en
dernier ressort, de respectivement obeÿr et satisfaire aux commandemens qui
leur seront faictz par lesd. chambres, tout ainsy qu'ilz ont accoustumé de
faire ausd. parlemens, à peine de privation de leurs estatz.
XV, 03
Et pour l’entretenement des garnisons qui devront estre entretenues esd.
villes, places et chasteaux, leur a Sad. Majesté accordé jusques à la somme de
neuf-vingts mille escus, sans y comprendre celles de la province de Dauphiné,
ausquelles sera pourveu d’ailleurs de lad. somme de cent quatre-vingts mille
escus par chacun an, leur promet et asseure en faire bailler les assignations
bonnes et valables sur les plus clairs deniers où seront establies lesd.
garnisons. Et où elles n’y suffiroient, et qu’il n’y eust en icelles assez de
fonds, leur sera parfourny le surplus sur les autres recetes plus prochaines,
sans que les deniers puissent estre divertis desd. recetes que lad. somme n’ait
esté entierement fournie et acquitée.
XV, 04
Leur a en outre Sad. Majesté promis et accordé que, lorsqu’elle fera et
arrestera l’estat desd. garnisons, elle appellera auprés d’elle aucuns de ceux
de lad. Religion pour en prendre leur advis et entendre sur ce leurs
remonstrances, pour aprés en ordonner ; ce qu’elle fera toujours le plus à leur
contentement que faire se pourra. Et si, pendant le temps desd. huit années, il
y a occasion de faire quelque changement sur led. estat, soit que cela procede
du jugement qu’en fera Sad. Majesté ou que ce soit à leur requisition, elle en
usera de mesme qu’à le resoudre pour la premiere fois. Et quant aux garnisons
de Dauphiné, Sa Majesté dressant estat d’icelles prendra sur ce l’advis du
sieur de Lesdiguieres.