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[fol. 164v]
[fol. 165]

Povoir sur le fait de la guerre1

Charles, par la grace de Dieu roy de France, a tous ceulx qui ces presentes lettres verront, salut. Comme pour preserver et garder noz bons et loyaulx subgetz des griefs et oppressions que pieça leur ont fait, font et s'efforcent de faire chascun jour, a nostre tres grant desplaisance, noz anciens ennemis les Angloiz, recouvrer aussi les païs de nostre seigneurie qu'ilz detiennent et occuppent de long temps en nostre païs de Guienne et obvier a leurs entreprinses et courses qu'ilz fonta souventes fois en nostre païs de Poictou, Xaintonge et Angolmois, soit expedient et chose neccessaire de pourveoir aux frontieres desdiz païs d'un bon chief, saige, expert en fait de guerre et puissant de resister a nosdiz ennemis et autres noz rebelles, leurs adherens et complices, et aux entreprinses envoyees qu'ilz ont entencion de brefment faire en iceulx noz païs, comme entendu avons, en deffaultb de laquelle chose se pourroient ensuir a nous et a nosdiz subgetz dommaiges et inconveniens irreparables, savoir faisons que nous, aians consideracion aux choses dessusdictes et desirans y pourveoir de remede a nostre povoir, confians entierement et a plain des sens, vaillance, loyaulté, experience et bonne diligence de nostre amé et feal chevalier, conseiller et chambellan de N., icellui par grant et meure deliberacion de conseil avons fait, commis, ordonné et estably, faisons, commettons, ordonnons et establissons par ces presentes cappitaine general de par nous sur le fait de la guerre esdiz païs de Poictou, Xaintonge et Angolmoys et es diocesesc et ressors d'iceulx, pour lesdiz païs et noz loyaulx subgez garder et deffendre contre nozdiz ennemis. [fol. 165v] Et lui avons donné et donnons par cesdictes presentes plain povoir, auctorité et mandement especial de demander, assembler et faire venir devers lui en un ou pluseurs des lieux desdiz païs, diosesesd et ressors, ensemble ou particulairement, tous les nobles, vassaulx et subgez d'iceulx qui ont acoustumé de eulx armer ; de les faire armer et mettre sus, les mener et faire tenir avecques soy ou il verra estre necessaire de les mener et employer a la garde et deffense desdiz païs, ainsi que bon lui semblera ; de faire et porter toute guerre et dommaige a iceulx ennemis par tous les lieux et manieres que faire le pourra ; de veoir et visiter les villes, chasteaulx, forteresses et passages d'iceulx païs, a quiconques ilz appartiennent, et celles qui ne sont tenables et de bonne seurté et deffensables faire demoulir, abatre et desemparer, s'il voit que ce soit chose expedient a faire pour le bien, seurté et prouffit de nous et de nosdiz païs, et les deffensables faire advitailler, fortiffier et emparer ainsi que mestier sera, et a ces choses faire contraindre et faire contraindre2 tous ceulx qu'il appartendra par toutes voyes en tel cas acoustumees ; de pourveoir et establir lesdictes villes et forteresses et autres places et passages tenables ainsi qu'il verra estre a ffaire pour donner resistance a nosdiz ennemis, et autrement les grever comme possible sera ; de croistre ou diminuer, muere ou changier les garnisons que ja sont en icelles places et par autre maniere y pourveoir ainsi que pour la garde et seurté d'icelles et le bien desdiz païz lui semblera bon de faire ; de donner lettres de sauf conduitf, de passage ou seurté a ceulx et pour tel temps qu'il verra estre expedient ; de faire garder, executer et enteriner lesdictes lettres ; de reduire et mettre en nostre obeïssance toutes villes et places et les nobles et autres habitans en icelles qui ne seroient en nostredicte obeïssance par puissance, main armee ou autrement par composicion ou voye amiable ; de recueillir et recevoir et mettre en nostre bonne grace et mercy ceulx qui voluntairement remettre et reduire se vouldroient en nostredicte obeïssance ; de leur remettre et pardonner pour nous et nostre nom tous crimes et malefices par eulx commis a l'encontre de nous et sur ce leur bailler ses lettres, soy faisant fort des nostres confirmatoires, lesquelles en ce cas nous octroyerons toutes fois que requis en seronsg, tout ainsi que par les siennes promis et enconvenenciéh l'aura ; de assegieri et autrement [fol. 166] contraindre par voye de fait tous ceulx qu'il trouvera noz rebelles et desobeïssans ; de faire faire de leurs personnes telle pugnicion et justice comme au cas appartendra. Et pour ce que les choses dessusdictes ne se pourront executer sans grant finance, a icellui avons donné et donnons plain povoir, auctorité et mandement especial, appellez avecques lui noz seneschaulx ou bailliz desdiz païs pour l'acompaigner et conseiller, de mander et faire assembler les trois estaz d'iceulx païs et leur requerir et demander telle aide de finance et autrement comme sera expedient et convenable pour l'execucion des choses dessusdictes ; et de icellui aide, tel qu'il sera advisé et octroyé par lesdictes gens des trois estaz ou pour la plus grant et sainne partie d'iceulx, mettre sus et le faire cueillir et lever par personnes souffisans et ydoines, et de le faire distribuer ainsi et par la maniere que a ladictej sera advisé et conclud pour le bien de nous, desdiz païs et de la chose publicque d'iceulx, pourveu toutevoyes que, se les habitans esdiz ressors en porteront et paieront pour leur part et porcion, ne soit ou tourne ou prejudice d'eulx ne de leurs privileges ores ne pour le temps a venir ; et generaument de faire en et par toutes les choses dessusdictes et chascune d'icelles, leurs circunstances et deppendences tout ce qu'il verra et congnoistra estre au bien de nous et de nostre seigneurie et autant comme nous ferions se presens y estions. Si donnons en mandement par ces mesmes presentes a tous les nobles, vassaulx et subgez desdiz païs, dyoceses et ressors, a tous cappitaines de gens d'armes et de tret, cappitaines de villes, places, chasteaulx, forteresses et passages desdictes frontieres et a tous noz autres justiciers, officiers et subgez a qui il appartendra et a chascun d'eulx que audit maistre des arbalestiers3, comme a cappitaine general de par nous, et a ses lieuxtenans et commisk en ceste partie en tout ce que dit est obeïssent et entendent diligemment comme a nous mesmes et leur donnent conseilh, confort et aide, retrait, passage et plaine ouverture a toutes heures selon que requis en seront. Et pour ce que de ces presentes on pourra avoir a ffaire en pluseurs et divers lieux, voulons et nous plaist que au vidimus d'icelles, fait soubz seel auctentique, plaine foy soit adjoustee comme a ce present original. Auquel, en tesmoing de ce, nous avons fait […]k.


a qui font ms, corrigé avec P.
b abrégé deff- dans le ms ; le mot est entier dans P.
c précédé de dyose, rayé.
d sic ms.
e muez ms.
f saul conduit ms.
g seront ms.
h encommencié ms, corrigé avec P.
i assegiez ms.
j sic ms ; nous ne savons s'il faut restituer a ladicte assemblee ou corriger en suivant P, qui donne par la forme et maniere qu'il sera advisé et conclud.
k conmis ms.
k La formule s'achève dans ms, avec la page, sur cette chute abrupte ; P porte En tesmoing etc. Donné etc.
1 Cette lettre est partiellement citée par Thomas, Les états provinciaux, t. I, p. 38, qui la date d'avant 1426. Étant donné que, à la fin de la formule, on identifie le capitaine général sur le fait de la guerre en Poitou, Saintonge et Angoumois avec le maître des arbalétriers, on peut supposer qu'il s'agit de Jean, sire de Torsay, qui a détenu la charge de maître des arbalétriers de janvier 1416 à février 1426 au moins (Guérin, au t. 26, 1896, p. 242-247).
2 Comprendre : “et contraindre et faire contraindre à faire ces choses…”.
3 N'a pas été cité plus haut, mais échappe ici à la dépersonnalisation de la formule.